mercredi 20 avril 2011

Le rameur

Il y a un type de joueur de tennis qui s'appelle le "rameur". C'est quoi, un rameur? C'est un joueur dont l'objectif principal est de renvoyer la balle dans le court une fois de plus que vous. Il ne prend pas de risque. Quand il attaque, c'est que l'échange est engagé depuis longtemps et que vous êtes à la merci d'un contre. Vous ne le verrez presque jamais à la volée (mais ne soyons pas injuste avec le rameur car aujourd'hui, à de rares exceptions près, plus personne ne va faire le point à la volée).
En d'autres termes, le rameur attend. Il attend que vous fassiez la faute. Il vit de vos erreurs et de votre fragilité mentale. Face à un attaquant, le moment qu'il préfère est lorsque celui-là perd patience et rate. De plus en plus. Jusqu'à l'écœurement. Le plaisir du rameur est de voir votre jeu se décomposer.
Il attend car il peut attendre. Sa force réside dans sa régularité et des capacités physiques hors normes. Quand il vieillit on ne l'appelle plus "rameur", mais "crocodile".
Joueur à sang froid, peau dure, et aux tendances masochistes prononcées, le "rameur" est ravi qu'on le balade de gauche à droite et qu'on le fasse courir, suer, glisser, souffler, crier... car ainsi il n'a pas à prendre les rennes de l'échange. Il est soulagé du fardeau de la décision et peut jouir sans entrave du match.
Contre lui, l'épreuve est surtout dans la tête. Il faut savoir choisir encore plus que d'habitude. Choisir le bon timing pour attaquer. Car le rameur est de fait un défenseur exceptionnel. Vous n'en reviendrez pas de ce qu'il peut ramener. Alors vous êtes obligé de placer votre attaque au bon moment, dans la bonne position, pour être sûr de faire mouche sans commettre d'erreur inutile. Concentration maximum exigée.
Un truc pour le déstabiliser : lui imposer des déplacements vers l'avant (balles croisées courtes, amorties...). Car si le rameur est quasi imprenable sur sa ligne de fond, il déteste la quitter. En dehors de cette zone, en particulier quand il s'approche du filet, il n'a plus les mêmes repères et manque cruellement d'automatismes. Il faut donc lui imposer ce genre de courses vers l'avant et casser, tant que faire se peut, ses allures de métronome.