samedi 23 avril 2011

Gilles Simon, quelques grammes de finesse...



Aujourd'hui le tennis étouffe et s'uniformise sous le diktat de la puissance. Profil type : être grand, servir fort, et avoir un coup droit de bûcheron. Gilles Simon fait partie des joueurs qui résistent à l'extension de ce triste modèle.
D'apparence frêle, presque fragile, Simon cache bien son jeu. Un vrai jeu de contre-attaquant (à distinguer du  rameur, catégorie dont il ne fait pas partie, sauf les jours sans). Le Français, pianiste à ses heures, nous offre quelques grammes de finesse dans un monde de brutes. Sur le court comme en dehors (car ses interview sont toujours plus intéressantes que celles de ses camarades et témoignent de sa vision intelligente du jeu).
Mais revenons sur le court. D'abord, Gilles Simon ressemble au rameur. Il renvoie la balle et court partout. Il prend la mesure de son adversaire. Apparaissent ensuite des gestes qui ne conviennent pas au rameur : il prend la balle tôt, coupe les trajectoires, gagne du temps sur son adversaire et tient bon, sans reculer, au niveau de sa ligne de fond.
Quand la machine s'est mise en route, c'est un festival de ruse et de précision : Simon est capable d'attaquer aussi bien en coup droit qu'en revers et, grosso modo, d'envoyer la balle où il veut, et surtout où il faut. Mais ce qui fait l'originalité de Simon, c'est qu'on n'a jamais l'impression qu'il cogne (comme Murray). Pas de déflagration comme au moment où Nadal lâche un coup droit, aucun signe extérieur de puissance. On a l'impression, lorsqu'il est à son meilleur niveau, que tout se passe au niveau des jambes et du timing, et qu'il danse. Bien placé, il s'appuie sur la balle de son adversaire et, sans effort apparent, il la renvoie à plat, tendue, en opposition. Mieux vous jouez, mieux il joue, admit Federer après leur match aux Masters, en 2009. 
Arrive ce moment de grâce où, en dansant, Simon absorbe la puissance de son adversaire et la lui renvoie décuplée. Mais naturellement, comme si la raquette n'était ni une arme ni une prothèse mais l'interprète délicate et attentive de son bras. Au lieu d'attaquer la balle, c'est presque comme s'il se couchait dessus, anticipant toujours les coups de l'autre, dans une séquence fluide, sans à-coups, presque nonchalante.